Renforcement de l’attractivité du Territoire National pour l’Accueil des Organisations Internationales

Catégories: Droits de l'Homme, Euromed, Europe, International, Justice, Missions auprès du gouvernement, Rapports, Sécurité

RAPPORT DE M. MICHEL HUNAULT, DEPUTE, PARLEMENTAIRE EN MISSION
AUPRES DU MINISTRE D’ETAT, MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES
ET EUROPEENNES,
A L’ATTENTION DE MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE SUR
LE RENFORCEMENT DE L’ATTRACTIVITE DU TERRITOIRE NATIONAL POUR L’ACCUEIL DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES
Le 20 avril 2012

INTRODUCTION
Trente trois organisations internationales et vingt neuf bureaux ou représentations d’organisations sont répertoriés comme installés en France par le Ministère des Affaires étrangères et européennes à la date d’aujourd’hui (cf. annexe 1).
Vingt trois organisations – dont le Conseil de l’Europe, l’OCDE, l’UNESCO, INTERPOL, et le Parlement européen – y ont conforté leur siège avant 1975.

Les décennies plus proches de nous ont vu s’y ajouter une nouvelle génération d’organisations, consacrées notamment à des domaines scientifiques et technologiques de pointe, dans lesquels notre pays possède une expertise et une maîtrise mondialement reconnues ; il s’agit notamment de l’espace, avec l’ESA – Agence spatiale européenne, en 1975, et du nucléaire, avec le réacteur expérimental ITER à Cadarache, en 2005. La population des organisations internationales s’est également enrichie, depuis vingt ans, de l’établissement de six institutions et agences de l’Union européenne, dont deux ont été créées en 2011 : l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA), installée à Paris, et l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice, avec un siège à Tallinn et son antenne opérationnelle à Strasbourg.
A titre de comparaison, la Suisse, forte d’une tradition séculaire d’accueil d’organisations internationales, en héberge vingt-cinq avec lesquelles elle a conclu un accord de siège ; vingt-deux d’entre elles sont établies à Genève. L’Autriche, siège de l’Agence internationale de l’énergie atomique depuis 1957, a connu un afflux important d’institutions internationales depuis la construction, en 1979, du Centre international de Vienne ainsi que la création de l’OSCE ; vingt-deux organisations internationales ont aujourd’hui leur siège dans la capitale autrichienne.
Le tableau des organisations installées en Europe ne serait pas complet sans mentionner Bruxelles, avec principalement l’Union européenne et l’OTAN, et La Haye, siège de la Cour
internationale de justice, de la Cour pénale internationale et d’une pléiade d’institutions spécialisées dans le domaine du droit. A noter enfin que le Royaume Uni a cantonné ses ambitions en matière d’accueil à quelques domaines : la maîtrise des mers avec l’Organisation maritime internationale ; la finance, avec la Banque européenne de reconstruction et de développement (BERD), et les marchés de matières premières, où les organisations par produits (organisation internationale du café, organisation internationale du cacao) et les bourses de commerce se côtoient avec bonheur.
De ce rapide survol, il ressort que la France est globalement bien dotée, tant par le nombre que par l’importance des organisations internationales installées sur son territoire.
Faut-il en conclure que nous pourrions nous contenter de maintenir cet acquis ? Ce serait faire fausse route, pour au moins trois raisons :

a) Pour nombre d’entre elles, et des plus importantes (Conseil de l’Europe, INTERPOL, OCDE, UNESCO), l’implantation des organisations internationales en France est le fruit d’une diplomatie et l’héritage d’une époque, l’une et l’autre, assez éloignées. Pour valoriser ce legs historique et affirmer son actualité, il importe d’assumer pleinement la responsabilité privilégiée qui nous revient auprès de ces grandes organisations : ceci implique d’agir au coeur de leurs initiatives face aux défis du monde d’aujourd’hui, et aussi de faciliter leurs efforts de modernisation.
b) Aucune situation ne saurait être considérée comme acquise dans un contexte de compétition accrue entre Etats pour l’accueil des organisations internationales et de recherche d’économies et de gains d’efficacité de la part de celles-ci. La délocalisation partielle d’INTERPOL à Singapour, sur laquelle nous reviendrons dans ce rapport, en offre une illustration typique dont il est essentiel de tirer les leçons.
c) Les efforts des Etats pour inciter les organisations internationales à venir s’y installer traduisent une volonté d’accroître leur prestige et leur influence sur la scène internationale ; ils contribuent dans le même temps à renforcer l’attractivité de leurs capitales, à témoigner de leur modernité, et à favoriser la création d’emplois et de revenus. Démontrer notre capacité d’accueillir dans les meilleures conditions des organisations internationales de nouvelle génération dans les domaines qui nous intéressent, c’est aussi faire la preuve du dynamisme de notre pays et de ses institutions.
Que le conservatisme tranquille ne soit pas de mise ne signifie pas qu’il faille, à l’opposé, entrer dans une course systématique à l’obtention de nouveaux sièges. Les mutations en cours de notre environnement international plaident pour un rééquilibrage au profit de régions du monde moins bien dotées que nous en sièges d’organisations internationales. La France promeut ainsi le projet d’une Organisation des Nations Unies pour l’environnement (ONUE) installée à Nairobi, siège à ce jour du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Au sein de l’Union européenne, les représentants des États membres, réunis au niveau des chefs d’État ou de gouvernement le 13 décembre 2003, sont convenus de donner la priorité aux États adhérents, une fois qu’ils seront devenus membres de l’Union, pour ce qui est de la répartition des sièges des organismes (agences, autorités indépendantes, …) appelés à être créés (cf. annexe 9).
L’approche préconisée dans le présent rapport repose sur l’hypothèse que le meilleur moyen d’améliorer l’attractivité de notre pays à l’égard des organisations internationales consiste à y créer un contexte optimal, propre à mettre en valeur l’activité de celles que nous accueillons déjà dans des domaines essentiels pour notre politique et notre rayonnement dans le monde. Cela implique tout d’abord de leur assurer des conditions répondant à leurs besoins opérationnels et diplomatiques, à la hauteur de ce que peuvent proposer les Etats hôtes « concurrents » (I). Au-delà de ce cadre minimum, il paraît essentiel de mieux exploiter le potentiel de synergies exceptionnel entre l’activité des grandes organisations implantées en France et les priorités de notre politique internationale (II).

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I – LA PRESENCE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES DANS NOTRE PAYS APPELLE UNE ATTENTION PLUS SOUTENUE ET MIEUX COORDONNEE DES POUVOIRS PUBLICS

L’implantation des organisations internationales sur le territoire français fit l’objet d’une étude du Conseil d’Etat, adoptée en Assemblée générale plénière le 19 juillet 2007. Des propos que le parlementaire en mission a recueillis auprès d’un large échantillon d’organisations internationales ainsi que des administrations d’Etat concernées (ministère des Affaires étrangères et européennes; ministère de l’Economie, des Finances et du Budget), et de la relecture de ce rapport, il ressort que le diagnostic alors porté par la Haute Assemblée ainsi que beaucoup de ses recommandations restent d’actualité.

I.1 – L’effort consenti par les pouvoirs publics en faveur des organisations internationales implantées sur notre territoire ne saurait être ignoré.

I.1.1 – Des implantations façonnées par l’histoire

Le panorama des organisations internationales présentes sur notre territoire s’est d’abord formé au rythme de la construction du nouvel ordre démocratique, en Europe et dans le monde, à laquelle la France s’est attachée au côté de ses alliés au sortir du chaos de la deuxième guerre mondiale. C’est à cet élan historique que l’on doit la présence en France d’organisations de premier plan, avec la création de l’UNESCO (première conférence générale à Paris en novembre 1946 ; siège actuel inauguré en 1958), de l’OCDE (qui a succédé en 1961 à l’Organisation européenne de coopération économique, créée en 1948), et du Conseil de l’Europe, installé à Strasbourg dès 1949 et doté de son bâtiment actuel en 1977, ainsi naturellement que l’implantation dans la même ville du Parlement européen.

C’est à la même période que l’on peut rattacher INTERPOL, installée à Paris en 1946 puis à Lyon depuis 1989, et le CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), fondé en 1954, dont les installations s’étendent à cheval sur les territoires français et suisse.

Le rythme des implantations s’est ralenti à partir des années soixante-dix. Deux créations seulement sont ainsi à signaler dans la catégorie des organisations de premier rang au cours des quatre dernières décennies : l’Organisation internationale de la francophonie, créée en 2005 (héritière de l’Agence de coopération culturelle et technique fondée par la convention de Niamey du 20 mars 1970) ; le réacteur thermonucléaire expérimental international – ITER, dont l’implantation sur le site de Cadarache a été décidée en 2005 au terme d’une rude compétition internationale.

Si ces grandes institutions forment la partie la plus visible de la cartographie des organisations intergouvernementales installées en France, celle-ci en comporte d’autres, qui pour être plus modestes par leur taille, moins exposées à la visibilité publique ou consacrées à des champs d’activité plus ciblés, n’en jouent pas moins souvent un rôle déterminant dans leurs domaines respectifs. Trois catégories méritent une attention particulière :

- Les agences techniques, d’implantation souvent ancienne, qui contribuent à l’édiction et à l’harmonisation des normes, à la diffusion de bonnes pratiques et à la coopération au sein du secteur concerné, telles l’Organisation mondiale de la santé animale (1924), qui jouit d’une certaine visibilité chaque fois que se répand une nouvelle épizootie, ou l’Organisation internationale de la vigne et du vin (1927).

- Les services ou organismes délocalisés d’organisations internationales dont le siège même est hors de France. Méritent d’être signalée à ce titre, la présence à Paris de la Division Technologie, Industrie et Economie du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) dont le siège est à Nairobi, et celle à Lyon du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) rattaché à l’Organisation mondiale de la santé (OMS), dont le siège est à Genève.

- Les agences et autorités créées par l’Union européenne, au nombre de six ayant leur siège en France grâce à deux implantations récentes, acquises en 2011 : celle à Paris de l’autorité des marchés financiers (ESMA), l’une des trois composantes du système de régulation renforcé mis en place par l’UE après la crise de 2008 ; celle à Strasbourg de la partie opérationnelle de l’Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information, bien que son siège soit à Tallinn.

I.1.2 – Un dispositif d’accueil bien rodé mais dont la réactivité aux besoins exprimés n’est pas toujours assurée.

a) Les moyens administratifs et financiers déployés par la France comme Etat hôte sont communément reconnus.

Nombreux parmi les hauts fonctionnaires internationaux rencontrés au cours de cette mission ont tenu à signaler au parlementaire en mission la qualité de leur relation de travail avec le Protocole du MAEE de même que les efforts déployés par les autorités locales (à Lyon et à Strasbourg) pour favoriser l’insertion des organisations et de leurs personnels dans leur environnement territorial.

Les faits et les chiffres sont là pour mesurer l’effort fourni par l’Etat et par les collectivités territoriales en faveur des organisations internationales sur notre territoire. Quand bien même cet effort découle pour l’essentiel de l’application des immunités et privilèges liés au statut de ces organisations, ainsi qu’à des usages communs à beaucoup d’Etats hôtes, il n’est pas inutile, sans prétendre à l’exhaustivité, de signaler quelques données (détaillées dans les annexes au présent rapport) :

- Les personnels des organisations internationales, leurs conjoints et enfants, constituent plus de la moitié de la population dont les titres de séjour spéciaux, privilèges, immunités et situations individuelles sont gérés par le service du Protocole du MAEE. Ils étaient au nombre d’un peu moins de 14000 en mars 2012, pour un peu plus de la moitié travaillant dans les organisations, auxquels s’ajoutaient environ une population de 1700 personnes pour les délégations auprès de celles-ci.

- Le coût total annuel des privilèges fiscaux accordés aux organisations internationales, tel qu’estimé par le Ministère de l’Economie et des Finances (cf. annexes 5, 6), s’élève à 120 millions d’euros (dont 100 millions de remboursement de TVA), auxquels s’ajoutent le coût de l’exonération d’impôt sur le revenu, de 50 à 100 millions d’euros selon l’hypothèse de revenus retenue, de celle de la taxe d’habitation (de 1 à 2 millions d’euros), et de la taxe foncière pour l’UNESCO, le Conseil de l’Europe et Interpol (de 912 000 euros).

- La pratique française honore, à des degrés divers, le principe selon lequel un effort particulier est attendu de l’Etat hôte pour aider au financement des grands travaux liés aux sièges des organisations, Elle a ainsi pris en charge l’intégralité des intérêts de l’emprunt de 80 millions d’euros contracté par l’UNESCO auprès de la Caisse des dépôts pour financer la deuxième phase de la rénovation du Siège, soit un coût estimé à plus de 20 millions d’euros. Dans le même esprit, elle a fait savoir qu’elle financerait le moment venu 10 % des travaux du futur nouveau siège de l’ESA. Sa part dans la construction du nouveau centre de conférences internationales de l’OCDE n’a en revanche pas dépassé sa quote-part de l’ordre de 7 % aux contributions obligatoires versées à l’organisation, soit tout de même un montant de 19,5 millions d’euros sur un coût total de 300 millions.

Force est de relever que la comparaison internationale sur ce point n’est pas toujours en notre faveur : le Canada assume 75% des coûts d’exploitation et d’entretien du siège de l’Organisation internationale de l’aviation civile internationale ; à Vienne, les accords de siège de l’Office des Nations Unies et de l’Agence Internationale de l’Energie atomique prévoient une prise en charge par l’Etat hôte de 50 % des coûts de remise en état des bâtiments.

- L’Etat a régulièrement apporté des améliorations au cadre conventionnel et administratif de l’activité des organisations internationales et de leurs personnels sur notre territoire, même s’il est permis de regretter – nous y reviendrons plus loin – les délais d’adoption de certains de ces textes ou de ces mesures. Evoquons, dans le domaine normatif : l’adhésion de la France, le 27 janvier 2000, à la Convention du 21 novembre 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées des Nations Unies (qui a résolu entre autres la question du régime fiscal des fonctionnaires des institutions onusiennes résidant dans le canton de Gex); l’actualisation à deux reprises de l’accord de siège d’INTERPOL ; ou encore l’adoption de la circulaire DPM/DMI 2 n°2004-212 du 7 mai 2004 (cf. annexe 7) qui permet l’accès au marché du travail des conjoints étrangers de certaines catégories de personnes, dont les fonctionnaires d’organisations internationales intergouvernementales.

b) Le dispositif en charge des organisations internationales au sein de l’administration n’est pas exempt de faiblesses.

- La coordination des administrations concernées.

Au ministère des Affaires étrangères et européennes, les questions touchant aux organisations internationales sont traitées, pour ce qui touche à la matière même de leurs activités, selon les cas, soit à la Direction des Nations Unies et des organisations internationales (NUOI), soit à la Direction générale de la mondialisation, soit encore, pour les agences de l’UE, à la direction de l’Union européenne. Certaines organisations échappent partiellement au MAEE dans la mesure où leurs activités ressortissent à un autre ministère, comme dans le cas d’INTERPOL dont l’interlocuteur institutionnel est le ministère de l’Intérieur (ses dossiers sont aussi suivis au Quai d’Orsay au sein de la Direction des Affaires de Sécurité et de Défense). Pour tout ce qui concerne l’application des régimes statutaires, deux sous-directions du Protocole constituent, au sein du MAEE, l’interface obligée avec le reste de l’administration (Impôts, Douanes, Ministère chargé de l’Emploi, Direction des Affaires juridiques du MAEE, etc.). Accaparé par la gestion quotidienne de procédures encore trop rarement dématérialisées et voué à un rôle de courroie de transmission avec les administrations décisionnaires, le Protocole n’est guère en position d’assurer une coordination proactive des services de l’Etat pour aider les organisations internationales à régler les problèmes auxquels elles sont parfois confrontées.

En conséquence, la coordination entre les administrations traitantes s’organise le plus souvent au cas par cas, sans qu’une instance d’impulsion et d’arbitrage puisse être toujours clairement identifiée comme responsable de la négociation avec l’organisation internationale concernée.

L’exemple du traitement des demandes de franchise du Conseil de l’Europe dans le cadre des activités de la Direction Européenne de la Qualité des Médicaments (DEQM), détaillé dans une note de la Direction générale des Douanes et des droits indirects annexée au présent rapport, a ceci de rassurant qu’il montre en conclusion que « l’administration a fait preuve d’initiative et de disponibilité afin de faciliter le traitement des demandes de l’organisation internationale et de tenir compte de ses spécificités en mettant en place une procédure « sur mesure » ». Relevons dans le même temps qu’il aura fallu deux ans, de septembre 2009 à octobre 2011, entre le moment où la DEQM a posé le problème et la mise en place par l’administration française d’un nouveau circuit de traitement ; le délai semble un peu long même si le sujet était complexe et touchait à la santé publique (contrôle de cellules souches arrivant sur le territoire français) (cf. annexes 6 et 28.6)

- Les délais de traitement des dossiers

Les responsables des sous-directions du Protocole, chargées des privilèges et immunités diplomatiques (PRO/PID) et des privilèges et immunités consulaires (PRO/PIC) eux-mêmes estiment que délais devraient être améliorés. Selon la même source, ils peuvent actuellement aller jusqu’à deux mois pour la délivrance des titres de séjour spéciaux aux agents du CERN, à trois mois pour les dossiers de remboursement de TVA, et à trois à quatre mois pour les exonérations de droits de douane.

Deux obstacles sont à surmonter : la réduction des effectifs opérée dans les deux sous-directions au titre de la RGPP (22 agents au total, au lieu de 24) ; le traitement par circuit papier de la quasi totalité des dossiers. A noter, au titre des améliorations récemment introduites, la décision récente d’allonger la durée de validité des titres de séjour spéciaux de deux à cinq ans.

I.1.3 – Une politique d’attractivité encore trop peu systématisée.

a) Nul ne saurait contester la capacité de l’appareil d’Etat à se mobiliser dans les occasions où un objectif particulier a été désigné comme priorité politique.

Le Conseil d’Etat relevait ainsi, dans son rapport de 2007, le caractère singulier, et remarquable, du succès d’ITER, acquis au terme de deux ans d’un effort diplomatique considérable pour défendre la candidature française : nomination en novembre 2003 d’un émissaire du Gouvernement chargé de l’implantation d’ITER à Cadarache et d’un délégué interministériel ITER ; offre en termes d’infrastructures, notamment scolaires, à la hauteur de l’enjeu ; suivi du projet sur le plan technique par une « Agence ITER-France » et sur le plan administratif par un ambassadeur, haut représentant pour la réalisation en France du projet ITER.

De même, le gouvernement, saisi du risque de voir la Chambre de Commerce internationale envisager un possible déménagement de la Cour internationale d’arbitrage hors de France, a su trouver les moyens de pérenniser sa présence à Paris, dans les anciens locaux de l’Assemblée de l’UEO, rachetés et rénovés par l’Etat, avec un bail de vingt ans à des conditions privilégiées. Il reste à finaliser la négociation des « détails » de cette pérennisation, qui fournirait semble t-il l’occasion pour les responsables de la CCI de comparer aujourd’hui la fermeté affichée par notre Direction générale des Douanes aux franchises qu’avaient proposées les autorités helvétiques pour attirer la Cour d’arbitrage à Genève. Ce point de désaccord, sil était confirmé, pose la question de la mise en cohérence de l’ensemble des administrations concernées au service d’une politique d’attractivité : le traitement des privilèges fiscaux et douaniers devrait être modulé dans le cadre d’un bilan coûts – avantages global.

La mobilisation autour d’ITER, au caractère exceptionnel justifié par l’importance des enjeux et par les effets économiques escomptés, démontre la capacité des services de l’Etat d’optimiser les procédures administratives au service de projets dès lors qu’ils sont présentés et perçus comme prioritaires.

Anticipant le nombre des demandes de franchises douanières pour les composants importés du réacteur expérimental (8000 demandes par an dès 2012- 2013, puis 20 000 à partir de 2015) la Direction générale des douanes et des droits indirects et le Ministère des Affaires étrangères et européennes travaillent à mettre au point conjointement un système de dématérialisation de leur traitement, (exposé dans une fiche de la DGDDI en annexe). Il est à relever que cette procédure électronique, conçue pour accompagner le projet ITER, pourrait être étendue au traitement des demandes de franchise douanière de l’ensemble des organismes privilégiés, ceci à la condition d’un arbitrage permettant au MAEE et à la DGDDI d’intégrer ce projet dans leur programme informatique 2013.

b) Il manque à la France un dispositif d’accueil à la disposition de l’ensemble des organisations internationales, tel qu’ont su le mettre en place certains pays hôtes.

Le contraste avec la Suisse – qui fait figure de l’avis général de modèle en ce domaine – est des plus parlants. Celle-ci offre ainsi aux organisations internationales installées ou susceptibles de s’installer sur son territoire :

- Une bonne lisibilité des règles qu’elle leur applique, au terme d’un effort de codification et de rationalisation dont l’expression est la loi fédérale, du 22 juin 2007, sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordées par la Suisse en tant qu’Etat hôte (cf. annexe 9). Entré en vigueur le 1er janvier 2008, ce texte a pour objet de clarifier les règles applicables sans préjudice des spécificités qui peuvent être prévues par les accords de siège. Le système français repose, a contrario, sur les seules dispositions énoncées dans l’acte constitutif de l’organisation ou bien dans son accord de siège, source de difficultés chaque fois que se pose une question omise dans ces textes (cf. par exemple l’exonération de TVA sur les travaux immobiliers de l’organisation, objet de la dernière renégociation de l’accord de siège d’INTERPOL).

- Un dispositif d’accueil dans le canton de Genève, qui se compose de la Fondation des immeubles pour les organisations internationales (FIPOI), destinée à faciliter l’implantation immobilière des organisations internationales , et du « Centre d’accueil Genève internationale» (CAGI), à la disposition des fonctionnaires internationaux et diplomates pour faciliter leur installation et leur intégration dans la région lémanique.

Il convient cependant de relever, à l’actif de notre pays, les initiatives du même ordre prises par certaines des collectivités territoriales concernées, soit en faisant bénéficier les organisations internationales de dispositifs au périmètre plus large, tels l’Agence de développement économique de la région lyonnaise (ADERLY) qui a facilité l’accueil d’INTERPOL, soit en se dotant d’organismes dédiés, tel le « Cercle européen », créé à Strasbourg par Pierre Pfimlin. Il reste que le niveau général de nos conditions d’accueil nous place, pour ne pas citer un interlocuteur, familier des grand sites d’accueil d’institutions onusiennes (Genève, Nairobi, Paris, New York, Vienne), « en queue de peloton ».

I. 2 – La concurrence internationale impose de moderniser nos procédures et nos modes de comportement dans le cadre d’une véritable politique d’accueil qui reste à mettre en œuvre.

L’accueil des organisations internationales fait l’objet d’une véritable compétition, où certains nouveaux candidats au statut d’Etat hôte déploient une politique d’attractivité dotée de moyens conséquents.

A titre d’exemple, la ville de Montréal s’est dotée depuis vingt ans, en collaboration avec les gouvernements du Canada et du Québec, d’un dispositif dédié aux organisations internationales dans le cadre de la politique générale d’attractivité menée par « Montréal International » (cf. www.montrealinternational.com). Il comprend la possibilité pour les organisations internationales d’obtenir un soutien financier du Fonds de développement International de Montréal (FODIM) et leur offre un service de conseil stratégique pour les questions de localisation, de recrutement, de mise en œuvre et de démarrage.

De notre aptitude à nous inscrire dans cette compétition dépendent non seulement les perspectives d’extension du réseau des organisations internationales mais aussi le maintien de l’existant. Le risque est en effet réel de voir les organisations les plus dynamiques tentées de se développer hors de notre territoire pour n’y conserver que leur siège statutaire et une implantation plus ou moins dévitalisée. La décision prise par INTERPOL de créer à Singapour son « Complexe mondial pour l’innovation » en offre un cas d’école, riche d’enseignements (I.2.1). Elle devrait inciter les pouvoirs publics à prêter une oreille plus attentive aux besoins exprimés par les organisations internationales implantées en France, comme l’ont souhaité tous les responsables rencontrés pour ce rapport (I.2.2) et à promouvoir une politique d’accueil conçue pour renforcer notre attractivité (I.2.3).

I. 2.1 – Le «cas INTERPOL » : de l’importance d’un accompagnement actif pour une organisation clé, appelée à poursuivre son expansion.

INTERPOL offre l’exemple d’une organisation qui s’est considérablement transformée. Composée de 19 Etats membres en 1946, elle en compte 190 aujourd’hui. La dernière décennie a vu doubler son volume d’activités pour répondre aux besoins croissants de la coopération policière. Son secrétaire général, M. Ronald Noble, assisté d’une équipe de direction où la France détient plusieurs postes importants, a dynamisé les méthodes de travail – le système de communication sécurisé est ainsi devenu opérationnel vingt-quatre heures sur 24 (réseau I 24/7) – et développé des projets innovants, appréciés par nos propres services de police (tel le développement de bases de données interactives concernant : les voitures volées, les fugitifs internationaux, les documents de voyage volés ou perdus, les empreintes digitales, les profils ADN, les données balistiques, l’exploitation sexuelle des mineurs).

A l’expansion de ses activités opérationnelles s’est ajoutée une activité diplomatique intense autour des problématiques internationales de lutte contre la criminalité et de sécurité, accentuée depuis les attaques terroristes commises aux Etats-Unis en septembre 2001. En témoigne, entre autre, l’inscription à l’ordre du jour du G8 sous présidence française de la lutte contre le trafic de drogues, objet d’une réunion ministérielle à Paris, le 10 mai 2011, qui a réuni vingt et un ministres de l’Intérieur d’Amérique du Nord et du Sud, d’Europe et d’Afrique, et dix responsables d’organisations internationales dont INTERPOL.

Cette dynamique a donné une acuité nouvelle à la nécessité qu’éprouvait INTERPOL de se doter d’une seconde implantation depuis déjà un certain temps. Le bâtiment lyonnais ne permet en effet d’accueillir que 350 de ses 600 collaborateurs, ce qui contraint l’organisation à louer quatre étages de bureaux supplémentaires à la Cité internationale de Lyon. Dès son arrivée à la tête de l’organisation, fin 2001, M. Ronald Noble a souhaité qu’INTERPOL puisse compter sur un second site afin de renforcer sa résilience en cas d’attaque terroriste ou d’accident technique. Il lui est vite apparu essentiel de disposer d’une implantation à Paris pour insérer pleinement l’organisation dans le circuit diplomatique et faciliter les échanges avec les responsables politiques du monde entier de passage dans notre capitale.

L’administration n’a sans doute pas mesuré immédiatement le caractère d’urgence que la direction d’INTERPOL attachait à cette question : peu après qu’une réunion interministérielle, organisée le 27 octobre 2010 au Secrétariat général du gouvernement, ait abouti à demander au ministère de l’Intérieur en liaison avec France Domaine de trouver une solution qui pourrait être proposée à INTERPOL, l’Assemblée générale de l’organisation, réunie en novembre 2010 à Doha, a approuvé la création à Singapour du « Complexe mondial INTERPOL » (CMI) qui doit ouvrir ses portes en 2014. La construction de ce complexe, d’un coût de 400 millions d’euros, est entièrement financée par Singapour.

Un échange entre M. Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, et M. Ronald Noble, à la faveur de la réunion ministérielle G8 élargie du 10 mai 2011, a permis une meilleure appréhension des enjeux : comme le rappelle une note du MAEE (cf. annexe 11), si la France n’agissait pas pour répondre aux préoccupations d’INTERPOL, l’organisation pourrait être tentée, après 2014, de transférer une part croissante de son activité de Lyon vers Singapour, voire de changer la localisation même de son siège.

Ces risques paraissent aujourd’hui écartés grâce à l’offre d’une installation au 36 quai des Orfèvres (après le déménagement du Tribunal de Grande Instance) que le ministre de l’Intérieur a présentée à M. Noble au moment même de l’élaboration du présent rapport. Mes interlocuteurs d’INTERPOL ont assuré que cette option, à condition d’être rapidement consolidée, conforterait la France dans sa position d’Etat hôte d’une INTERPOL en pleine expansion. L’implantation lyonnaise conserverait le même niveau d’activité tandis que Paris accueillerait les bureaux du Secrétaire général, de son cabinet, du Protocole et de quelques autres services, ainsi que des locaux permettant d’accueillir des délégations de haut niveau.

Pour s’achever sur une perspective rassurante, cette étude de cas n’en constitue pas moins une mise en lumière salutaire d’un certain nombre de points sensibles :

- l’intensité de la compétition pour l’accueil des organisations internationales (dans laquelle les attraits de Paris, l’insistance d’INTERPOL à s’y installer l’a montré, constituent encore un atout) ;

- les contraintes d’une implantation en région pour une organisation à forte activité diplomatique ;

- la nécessité d’un suivi attentif des besoins et des projets d’extension des organisations, à même d’alerter en temps souhaité les autorités politiques. INTERPOL aurait elle décidé d’aller à Singapour si une offre d’implantation à Paris avait été sur la table au moment de ce choix ? La question peut légitimement être posée.

I. 2.2 – Un inventaire des demandes et des besoins des organisations internationales.

Les contacts établis avec plusieurs organisations internationales pour l’élaboration de ce rapport permettent de dresser un inventaire qui, sans prétendre à l’exhaustivité, rend compte des principales préoccupations exprimées et des attentes qu’elles nourrissent dans leurs rapports avec la France dans sa qualité d’Etat hôte. Certains de mes interlocuteurs ont bien voulu développer leurs propos par écrit ; leurs contributions sont jointes en annexe au présent rapport.

- Les questions immobilières

Elles concernent non seulement les nouvelles implantations mais aussi, comme le cas d’INTERPOL l’a illustré (cf. § I.2.1), les organisations à la recherche de locaux mieux adaptés à leurs nouveaux besoins.

C’est le cas de l’Agence spatiale européenne, dont le siège (dans le 15ème arrondissement de Paris) abrite 300 collaborateurs et accueille des réunions hebdomadaires des délégués de ses dix-neuf Etats membres. L’accroissement de ses activités et l’adhésion de nouveaux membres (celle de la Pologne est imminente) conduisent à envisager soit une rénovation de ce bâtiment soit un déménagement à un horizon de deux ans. Une aide spécifique de la France (mise à disposition de locaux ou de terrains, location à tarif préférentiel, vente/location par France Domaine, …) est souhaitée. La France a fait savoir qu’elle apporterait une contribution exceptionnelle correspondant à 10% du besoin de financement (soit environ 8 M€), comme elle l’avait fait dans les années 1970, lors de l’implantation du siège de l’ESA. Les responsables de l’ESA rencontrés ont fait valoir oralement les efforts consentis par d’autres Etats membres, tels l’Espagne (qui prend en charge des deux tiers du coût de la construction du centre de conférences de l’ESA à Madrid) et l’Allemagne (qui finance 50 % d’un nouveau bâtiment à Darmstadt). Le MAEE observe cependant (cf. annexe 20) que pour ces pays, le retour géographique des implantations de l’ESA est incomparablement plus élevé que pour la France et qu’à la différence de ces pays, nos programmes spatiaux nationaux ont souvent bénéficié, à titre gratuit, aux travaux de l’ESA.

L’UNESCO est confrontée quant à elle à la nécessité de désamianter et de rénover son bâtiment de la rue Miollis dont l’état laisse en effet, l’auteur de ce rapport peut en témoigner, beaucoup à désirer. L’option d’un partenariat public privé qui permettrait à l’UNESCO de valoriser une partie de l’emprise foncière grâce à un investisseur privé, comme je l’ai suggéré lors de mes entretiens, a retenu l’attention de mes interlocuteurs.

- Le cadre juridique : la question des accords de siège

Le Conseil d’Etat, dans son étude de 2007, constatait (page 22) «les insuffisances de certains accords et les difficultés d’interprétation auxquelles font face les organisations internationales déjà implantées en France », et s’inquiétait de leurs conséquences négatives sur l’image de notre pays et de leurs effets sur les choix futurs d’implantation.

Des observations recueillies pour l’élaboration du présent rapport, il ressort que ce diagnostic demeure d’actualité. En témoigne, par exemple, le cas de l’Agence spatiale européenne, demandeur d’un accord de siège, à qui il est répondu que « le gouvernement français a toujours considéré que la conclusion d’un accord de siège ad hoc avec l’ESA n’était pas nécessaire, les privilèges et immunités prévus par l’annexe 1 à la Convention portant création de l’Agence lui ayant toujours paru suffisants pour permettre à l’Agence et à son personnel d’exercer leurs fonctions » , sans examiner sur le fond s’il y a ou non matière à actualiser ou à compléter ce texte. Dans le même esprit, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement a du mal à comprendre notre refus de conclure un accord d’établissement avec sa Division Technologie, Industrie et Economie. Cette attitude peut sans doute être parfois argumentée sur un plan strictement juridique ; elle dispense de surcroît de négocier l’étendue de privilèges et d’immunités que l’administration peut alors appliquer a minima ; elle ne fait rien en revanche pour concourir à notre objectif d’attractivité face à des Etats hôtes concurrents, plus à l’écoute des attentes des organisations.

- Les procédures administratives

Pour partie, les problèmes rencontrés sont propres à chaque organisation et supposent un traitement particulier, tenant compte des spécificités de son activité (cf. par exemple la « pharmacopée européenne », évoquée plus haut -§ I.2.1-b, ou bien l’ESA sur le site guyanais de Kourou, cf. note de l’ESA en annexe 21).

D’autres demandes, communes à la plupart des organisations rencontrées, portent sur des simplifications et des assouplissements dans l’intérêt de leurs missions. Elles concernent notamment :

- Les exemptions de TVA : les conditions et délais de remboursement sont particulièrement pénalisants pour les projets immobiliers, le remboursement ne pouvant être engagé qu’une fois l’usage officiel du bâtiment constaté le jour de l’emménagement ;

- Les délais de traitement des dossiers administratifs, fiscaux et douaniers, en l’absence d’informatisation des procédures (le schéma du cheminement d’un dossier du Conseil de l’Europe à la Direction générale des Douanes à Paris – cf. annexe 28.1- en offre un exemple édifiant).

- La délivrance des permis de travail aux conjoints non ressortissants de l’Union européenne reste un problème, signalé par l’OCDE et par le Conseil de l’Europe, incitation à évaluer la mise en œuvre effective de la circulaire DPM/DMI n°2004-212 du 7 mai 2004.

- La transparence des procédures et l’accès aux administrations

Le besoin d’une interface pour faciliter le dialogue entre les organisations internationales et les administrations françaises traitantes sur l’ensemble des questions liées à leur présence sur le territoire français (délivrance des titres de séjour, des immatriculations spéciales, exemptions fiscales, formalités douanières, …) a été souligné par presque tous les responsables d’organisations rencontrés (cf. notamment les notes en annexe du Conseil de l’Europe, de l’ESA et de l’OCDE). S’il est éprouvé par ces grandes organisations, il l’est plus encore par celles de taille modeste, moins pourvues en personnel administratifs pour traiter ces dossiers.

I.2.3 – Une politique d’accueil à mettre en œuvre.

Qu’il s’agisse de nous prémunir contre le risque d’une désaffection de la part des organisations présentes sur notre territoire ou d’y attirer de nouveaux sièges, les conditions à satisfaire sont peu ou prou les mêmes. L’appréciation par les organisations déjà implantées en France de l’accueil qui leur y est réservé est à l’évidence déterminante. Elle façonne la réputation de notre pays en tant qu’Etat hôte dans le monde des institutions multilatérales. A en juger par les témoignages recueillis, celle-ci est au mieux mitigée : la France est jugée trop peu soucieuse d’une part, de valoriser la présence des institutions internationales sur son sol et, d’autre part, de les soutenir sur le plan pratique et administratif dans l’accomplissement de leurs missions.

Le premier aspect de ce jugement est au départ de la réflexion et des propositions présentées dans la seconde partie de ce rapport.

Quant à la nécessité d’une amélioration de notre dispositif d’accueil, celle-ci avait été mise en évidence en 2007 par l’étude du Conseil d’Etat, qui allait jusqu’à appeler en la matière à un « sursaut national». Cinq ans ont passé jusqu’à la décision du Premier ministre d’initier la mission parlementaire à l’origine du présent rapport, et l’appel de la haute assemblée conserve toute sa pertinence. Il importe d’actualiser la conception même qui préside aux rapports que nos administrations entretiennent avec les organisations internationales dont la France est l’hôte : ceux ci évoquent encore trop souvent une relation traditionnelle et dépassée d’administration à administrés ; mener une politique d’attractivité dans un contexte de plus en plus concurrentiel suppose de traiter les organisations internationales comme des usagers voire même come des clients, à l’instar de ce que savent faire la Suisse et d’autres Etats. Pour assurer cette mutation, l’effort préconisé porte sur quatre domaines.

a) Une clarification du cadre juridique et de la réglementation en vigueur.

L’hétérogénéité des statuts négociés au fil des implantations est source de confusion : elle prive de référence claire les organisations désireuses de se livrer à une évaluation comparative entre la France et d’autres Etats hôtes ; elle alimente les demandes d’accords de siège de la part de celles des organisations implantées en France qui en sont dépourvues. Deux démarches, non exclusives l’une de l’autre, devraient y remédier :

- l’élaboration d’un corpus législatif de référence, applicable à l’ensemble des organisations internationales, à l’instar de la loi suisse (cf. en annexe 9, « loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités ainsi que sur les aides financières accordées par la Suisse en tant qu’Etat hôte » du 22 juin 2007 ») ;

- la mise au point d’accords de siège avec les organisations qui en sont dépourvues, de manière à actualiser et à harmoniser les régimes applicables.

Cet effort gagnerait à être complété par la mise en ligne de l’ensemble des informations sur les règles et sur les procédures en vigueur, accompagné d’un manuel pratique, sur un portail internet aisément identifiable, dédié à l’accueil des organisations internationales.

b) Améliorer les circuits de communication avec les administrations traitantes

Plusieurs des organisations rencontrées appellent de leurs vœux l’instauration d’un « guichet unique » afin de réduire les délais de traitement des dossiers et de mieux prendre en compte les contraintes et les besoins de chaque organisation (cf. notes ESA et OCDE en annexes 21 et 23).

Le seul recours à un guichet unique ne changerait guère la donne, ce d’autant qu’il existe déjà au Protocole du MAEE, interface obligée pour tous les échanges entre les organisations internationales et l’administration.

Les attentes que reflète cette suggestion n’en sont pas moins des plus justifiées. Trois mesures sont proposées pour y répondre :

- Remplacer systématiquement le recours au support papier par des procédures informatisées ; cet objectif devrait être inscrit parmi les priorités des programmes informatiques du MAEE et des services concernés du Ministère de l’Economie et des Finances ;

- Renforcer l’accueil et le suivi des organisations internationales au Protocole du MAEE. Les gains de temps permis par l’informatisation des procédures pourraient être mis à profit pour une relation plus personnalisée dans une approche « usager » voire « client ». Certains profils de poste devraient être redéfinis dans cette perspective. La possibilité de créer soit une sous-direction dédiée soit une cellule placée sous l’autorité directe du Chef de service pour être l’interlocuteur des organisations internationales (O.I.) mérite d’être aussi explorée.

Les contraintes budgétaires ne sont plus guère propices à des participations substantielles de l’Etat aux programmes immobiliers d’organisations internationales. Deux initiatives seraient cependant de nature à renforcer l’attractivité de notre offre :

- Instaurer un mécanisme d’exonération de la TVA à la source pour les contrats d’études ou de construction, au lieu du système actuel de remboursement après emménagement.

- Mettre à la disposition des organisations internationales un système d’information et de conseil pour leurs programmes immobiliers (qui pourrait être confié à l’Agence français pour les investissements internationaux – AFII) de même que notre expertise en matière de Partenariats Public Privé (à travers la Mission d’appui aux PPP, au Ministère de l’Economie et des Finances).

A signaler le cas particulier, près de Genève, de Divonne, commune française, prête à valoriser sa réserve foncière dans une logique de complémentarité avec le canton de Genève, à l’immobilier saturé.

d) Mettre en place un mécanisme de suivi interministériel de l’accueil des organisations internationales.

Pour développer une nouvelle approche de l’implantation des organisations internationales et se donner les moyens de traiter à temps les dossiers politiques dans ce domaine (comme il aurait été utile de le faire dans « le cas INTERPOL »), il paraît indispensable de disposer d’un outil de pilotage et de suivi interministériel. Pour éviter d’ajouter aux comités existants, cette mission pourrait être confiée au Comité interministériel des réseaux internationaux de l’Etat, au prix d’un ajout aux missions définies par le décret n° 2009-177 du 16 février 2009 (proposition : « Le comité est également chargé de définir les objectifs et les moyens de la politique d’accueil sur notre territoire des organisations internationales »).

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- Proposition n° 1 -

Il est proposé dans le même temps de nommer en appui de cette politique un ambassadeur chargé de l’attractivité de la France pour les organisations internationales et la diplomatie multilatérale

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II – IL EST DE LINTERET BIEN COMPRIS DE NOTRE PAYS DE SAVOIR SINVESTIR AU COTE DES GRANDES ORGANISATIONS INTERNATIONALES QUIL ACCUEILLE AFIN DE POURSUIVRE ENSEMBLE DES OBJECTIFS PARTAGES.

L’étude du Conseil d’Etat faisait observer que «la plupart des Etats qui développent une stratégie d’accueil cherchent à mettre en valeur des domaines prioritaires, qui correspondent soit aux secteurs dans lesquels des organisations sont déjà établies soit à des domaines d’excellence». La France est de ce point de vue aussi bien dotée que les Etats hôtes « concurrents ». La cartographie des grandes organisations internationales implantées sur notre territoire s’organise en effet autour de grands axes que l’on retrouve au premier plan de nos préoccupations de politique étrangère. Ce qui nous distingue en revanche des Etats hôtes « concurrents », c’est une moindre propension à faire connaître et à valoriser ces affinités électives. Ainsi, les organisations rencontrées pour l’élaboration de ce rapport expriment souvent le souhait de voir la France faire preuve d’un intérêt plus actif pour leur activité.

Les initiatives proposées dans cette partie du rapport reposent sur la conviction qu’une coopération renouvelée entre la France et les grandes organisations internationales implantées sur le territoire, outre qu’elle servirait nos objectifs dans les domaines concernés, contribuerait fortement à restaurer l’image de notre pays en tant qu’Etat hôte et de ce fait son attractivité. Ces propositions concernent quatre champs d’action prioritaires face aux défis que la France doit relever : la gouvernance économique internationale ; la coopération au service de la sécurité du citoyen ; la défense des droits de l’homme et la démocratie ; la promotion du dialogue entre les cultures, de la circulation des idées et de l’éducation pour tous.

Enfin, il est apparu indispensable de traiter dans cette partie de la question du Centre de conférences internationales : le dimensionnement d’un tel projet – et par suite l’évaluation de sa faisabilité dans le contexte économique et budgétaire actuel – suppose au préalable de s’interroger sur les besoins qu’il devrait satisfaire. La réflexion doit par conséquent porter pour commencer sur ce que devrait être aujourd’hui la stratégie de la France en matière de « diplomatie de conférences ».

II.1 – Eriger l’OCDE en pôle de référence pour la gouvernance financière et fiscale.

II. 1.1. Constat

L’amélioration de la transparence et de l’échange de renseignements en matière fiscale est à l’ordre du jour du G20 depuis sa première réunion au niveau des Chefs d’Etat et de gouvernement, qui s’est tenue à Washington en novembre 2008.

Le dernier Sommet du G20 à Cannes, en novembre 2011, a marqué sous l’impulsion de la présidence française une nouvelle étape dans la poursuite de cette priorité. Des résultats concrets y ont été présentés, illustrant l’engagement de la France en la matière :

- l’adhésion des membres du G20 à la Convention d’assistance administrative mutuelle en matière fiscale entre l’OCDE et le Conseil de l’Europe ;

- la publication des rapports et des listes sur différents types de juridictions non coopératives, établis par le GAFI, le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale, et le Conseil de stabilité financière ;

- le renouvellement de l’engagement solennel des pays du G20 à promouvoir la conformité aux standards internationaux d’échange d’informations fiscales et financières ;

- les propositions du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale visant à son élargissement et à la mise en place d’une assistance technique pour les nouveaux entrants.

L’OCDE joue un rôle de premier plan dans la poursuite de cet objectif,

déjà mis en lumière dans son rapport de 1998 sur les Pratiques fiscales dommageables, établi en réponse à une demande formulée par le G7 à Lyon en 1996. Elle assure les secrétariats du Groupe d’action financière (GAFI), chargé notamment de mettre à jour une liste publique des juridictions non coopératives en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, et du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements en matière fiscale (« Forum fiscal mondial »).

Le plan de travail du Forum fiscal mondial, qui compte aujourd’hui 105 juridictions membres, plus l’Union européenne et neuf observateurs, augure d’une forte croissance de ses activités pour les années à venir. Le rapport d’étape présenté au G20 de Cannes en novembre 2011 (cf. annexe 25) fait état de 59 examens par les pairs achevés à cette date, dont 17 examinent à la fois le cadre législatif et réglementaire (Phase 1) et la mise en œuvre pratique de la norme (Phase 2). Il prévoyait d’achever plus de 40 examens additionnels de Phase 2 et Phase 3 d’ici la fin de 2012 et environ 40 examens complémentaires de Phase 2 d’ici la fin de 2013. Il escompte rendre compte au G20 en 2012 et 2013 des « nouveaux progrès réalisés dans la mise en place d’un contexte fiscal plus équitable et plus transparent » suivant un renouvellement de son mandat pour une nouvelle période de trois ans.

Il convient enfin de relever enfin la forte implication de la France dans les travaux du Forum, à travers notamment la présidence du groupe d’évaluation par les pairs, assurée par le délégué général aux juridictions et aux territoires non coopératifs.

II. 1.2. Perspectives

De l’avis général des personnalités rencontrées, la France et l’OCDE auraient mutuellement à gagner d’une communication plus nourrie et d’une collaboration plus poussée. Chacun s’accorde dans le même temps à reconnaître l’impulsion nouvelle que la présidence française du G20 a favorisée.

Les chantiers de la transparence fiscale, du contrôle des mouvements financiers, et de la lutte contre le blanchiment d’argent ouvrent des perspectives de coopération avec l’OCDE qu’il est essentiel de développer, dans l’intérêt de notre propre politique comme de la visibilité et de l’ancrage de l’OCDE en France.

* * *

- Proposition n° 2 –

Il importe d’envisager à cet effet :

- la réunion à Paris sous l’égide de l’OCDE, à un rythme annuel, d’un forum mondial de la gouvernance financière et fiscale pour valoriser les progrès enregistrés à travers les différentes enceintes spécialisées intergouvernementales (le GAFI et ses groupes régionaux ; le Forum fiscal mondial, …); avec éventuellement un module associant les ONG (Transparency International, …) ;

- d’assurer lors du renouvellement du mandat confié par le G20 au Forum fiscal mondial, en 2013, le renforcement de cette enceinte et de son secrétariat permanent au siège de l’OCDE à Paris.

* * *

Au bout du compte, il s’agit de conforter la place de la France, aux côtés de l’OCDE, comme un des grands pays de référence sur les questions de gouvernance financière et fiscale.

II. 2 – Replacer la France au cœur de la dynamique d’INTERPOL II. 2.1 – Constat

L’historique du cheminement qui a conduit INTERPOL à décider, en novembre 2010, d’installer le futur « Complexe mondial INTERPOL pour l’innovation » à Singapour (cf. § I. 2.1 du présent rapport) permet de cerner rapidement les risques encourus et le défi qu’il nous appartient de relever.

Prévu pour entrer en activité en 2014, le complexe de Singapour bénéficiera d’une conception et de technologies de toute nouvelle génération. Il est à prévoir que ce complexe, à l’appellation explicite, drainera vers lui les projets les plus innovants de l’organisation. Le scénario du pire, qui verrait le siège de Lyon se vider peu à peu de sa substance pour apparaître in fine comme un vestige historique dont la pertinence pourra être contestée, ne relève pas, même si le trait est forcé, du champ de l’impossible. S’il est encore temps de réagir, il est impératif de le faire vite et de manière conséquente.

II. 2.2 – Perspectives

* * *

- Proposition n°3 -

- Il est essentiel que la décision de principe d’une implantation parisienne dans les locaux du 36 Quai des Orfèvres – effectivement disponibles dans 4 à 5 ans, ils offrent une solution idéale tant par leur situation dans la capitale que par leur charge symbolique (et romanesque) – soit officiellement consolidée au plus vite (par une lettre du Premier ministre et/ou un engagement écrit de France Domaine).

* * *

La France sera assurée à cette condition de conserver le siège d’INTERPOL autrement que par la loi de l’inertie et de l’unanimité des membres qu’exige la modification de ses statuts. De surcroît, la visibilité de l’activité diplomatique que le Secrétaire général d’INTERPOL entend mener depuis Paris nous permettra de mieux valoriser sur un plan politique notre investissement en tant qu’Etat hôte.

- Il est aussi important dans le même temps de ne pas laisser se « dévitaliser » le centre de Lyon. L’implantation de ce pôle opérationnel sur notre territoire garantit une pluralité de canaux possibles de coopération (avec Europol) que nos services de police souhaitent voir préserver.

A cet égard, c’est en participant activement aux projets innovants d’INTERPOL que la France favorisera leur maintien et leur développement à partir du siège lyonnais. Plusieurs des principaux projets en cours répertoriés (cf. fiche en annexe xxxx) peuvent relever de cette approche, parmi eux: la dématérialisation des procédures d’extradition ; la lutte contre la piraterie maritime ; le projet «SLTD – Banques» (projet pilote lancé en 2010 par le Bureau de coordination national France d’INTERPOL en coopération avec le secteur bancaire français, dont l’objectif est de pouvoir vérifier que les numéros de documents d’identité fournis par les clients des banques ne sont pas signalés dans la base Interpol des documents de voyage perdus et volés). Méritent encore d’être signalés à ce titre : la base de données sur les enfants disparus ; celle sur les personnes disparues et victimes de catastrophes naturelles ; le renforcement des programmes de lutte contre la cybercriminalité et contre le recyclage de l’argent sale et de la corruption dans le sport de compétition.

II. 3 – Conforter la place de Strasbourg comme capitale européenne de la démocratie et des droits de l’homme.

II. 3.1 – Constat

Siège du Parlement européen mais aussi du Conseil de l’Europe et de la Cour européenne des droits de l’Homme, Strasbourg concentre aujourd’hui une expertise unique en Europe dans les domaines qui touchent à la promotion de la démocratie et à la défense des droits.

C’est pour beaucoup le résultat des initiatives, aussi remarquables que trop rarement mises en valeur auprès de nos concitoyens, prises dans le cadre du Conseil de l’Europe, institué en 1949 et dont le premier Sommet tenu à Vienne en octobre 1993 rappelait la vocation de « garant de la sécurité démocratique, fondée sur les droits de l’Homme, la démocratie et l’Etat de droit ».

Les mécanismes de suivi indépendants mis en place permettent aujourd’hui d’évaluer, et dans une certaine mesure de guider, la mise en œuvre par les Etats membres de la plupart des droits et des principes fondamentaux que le Conseil de l’Europe a pour mission de promouvoir et la CEDH de protéger.

Peuvent être cités à ce titre :

- le Comité européen pour la prévention de la torture (CEPT) ; – le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains ; – la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance ; – la Commission européenne pour l’efficacité de la Justice (CEPEJ) ; – le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) ; – le Comité européen des droits sociaux.

Chacun s’accorde cependant à reconnaître que l’impact de ces dispositifs pourrait être renforcé par une meilleure mise en cohérence de leurs travaux, au service notamment d’une appréhension transversale de la défense des droits, ainsi que par la mise en place de synergies avec les services de la Cour européenne des Droits de l’Homme, dont la mission est de veiller au respect de la Convention européenne des Droits de l’Homme.

II. 3.2. Perspectives

L’objectif est de conforter la position de Strasbourg comme le lieu naturel d’accueil des institutions et des forums chargés de définir et de promouvoir une politique des droits de l’Homme et de l’Etat de droit en Europe. Il s’agit aussi de reprendre l’initiative après le choix de Vienne comme siège de l’ agence européenne des droits de l’homme à Vienne récemment créée.

* * *

- Proposition n° 4 -

Il est proposé de mettre en place, sous l’égide du Conseil de l’Europe, un « Forum européen des droits de l’homme », doté d’un secrétariat permanent, qui offrirait aux médiateurs/défenseurs des droits et, le cas échéant, à d’autres acteurs dotés d’une mission similaire, un cadre institutionnel pour l’échange d’expériences et la définition de stratégies. Dédié à une approche transversale de l’exercice par les citoyens de leurs droits fondamentaux, le Forum pourra convier les responsables des mécanismes de suivi indépendants concernés à participer à ses travaux. Il associera également les nombreuses ONG intéressées, accréditées auprès du Conseil de l’Europe.

* * *

- Proposition n° 5 -

L’Institut René Cassin et l’Université de Strasbourg pourraient être invités à prendre l’initiative d’une « Université Européenne des droits de l’Homme », sous la forme d’un réseau européen d’excellence associant universités et centres de recherche de différents pays, et dont le pôle de coordination serait installé à Strasbourg.

* * *

Les possibilités de cofinancement de ces projets par l’Union européenne, en vertu de son adhésion à la Convention européenne des droits de l’Homme, devraient être systématiquement explorées.

Ces projets peuvent également compter sur le dynamisme de la ville de Strasbourg, et des autres collectivités territoriales concernées, dont témoigne le lancement en 2012 d’un « forum mondial de la démocratie » organisé conjointement avec le Conseil de l’Europe.

II. 4 – Impulser à partir de la France le volet euro-méditerranéen d’un programme ERASMUS renforcé.

II. 4.1. Constat

Le programme ERASMUS, en facilitant la mobilité étudiante au sein de l’Union européenne, a plus fait pour l’affirmation de l’Europe que bien des discours. Son extension en direction des jeunes et des étudiants des deux rives de la Méditerranée apporterait une contribution capitale au dialogue des cultures ainsi qu’à une relation fondée sur la connaissance et le respect mutuel entre les pays européens et ceux de la rive Sud.

Sensible à ces enjeux, la Commission européenne a rendu public le 23 novembre dernier un programme ambitieux nommé « ERASMUS pour tous », pour la période 2014-2020. Son budget, en augmentation d’environ 70 % par rapport au programme actuel, devrait permettre de réaliser 800 000 mobilités de jeunes, d’enseignants et de chercheurs par an (84 000 pour la France) au lieu de 400 000 par an aujourd’hui. Ce projet prévoit de doter « ERASMUS pour tous » d’une dimension internationale renforcée et plus visible, qui inclut les pays des deux rives de la Méditerranée.

L’initiative prise par la France, dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée (UPM), de créer avec 14 autres pays du pourtour méditerranéen, l’Office Méditerranéen de la Jeunesse (OMJ), permet de développer dès l’année universitaire 2011-2012 les bourses de mobilité aux niveaux master et doctorat. Celles-ci s’accompagneront d’une délivrance des visas simplifiée pour les étudiants sélectionnés et d’une aide à une première expérience professionnelle. En phase expérimentale jusqu’en 2013, ce dispositif devrait contribuer au développement d’une vaste zone de mobilité au sein de l’UPM.

L’agence « Europe Education Formation France » (dite « 2E2F »), basée à Bordeaux, est l’opérateur du volet français du programme pour l’éducation et la formation tout au long de la vie (EFLTV) de l’UE, dont ERASMUS. Son professionnalisme et la solidité de son expérience la vouent à conserver un rôle central dans la mise en œuvre du volet français du futur « ERASMUS pour tous ».

II. 4.2. Perspectives

* * *

- Proposition n° 6 -

Par la densité de ses liens avec la rive Sud de la Méditerranée, par son action de précurseur comme pilote du projet d’Office méditerranéen de la Jeunesse, par la qualité et l’expérience de ses opérateurs (2E2F, Campus France), notre pays a vocation à jouer un rôle central dans la mise en œuvre du programme « ERASMUS pour tous » dans l’espace euro-méditerranéen.

* * *

Il importe de s’y préparer dès maintenant en liaison avec la Commission européenne pour mettre en place, le moment venu, le dispositif institutionnel le plus adapté.

Les questions de la pérennisation éventuelle de l’Office méditerranéen de la Jeunesse à l’issue de sa phase expérimentale, de sa forme juridique et de son lieu d’implantation devraient être aussi prises en compte dans ce dialogue.

Enfin, la France est bien placée pour faire inscrire ces initiatives dans le contexte plus large de la promotion de la tolérance et du dialogue des cultures, et pour identifier les synergies et les complémentarités possibles entre les politiques menées par l’Union européenne et par l’UNESCO. La relance du « Dialogue euro-arabe », initiée par les commissions nationales de l’UNESCO, objet d’une conférence internationale à Vienne les 31 mai et 1er juin prochains, témoigne de la convergence de nos préoccupations (cf. annexe 33).

II. 5. Définir nos objectifs dans le domaine de la diplomatie de conférences afin de se doter des équipements adaptés.

II. 5.1 – Constat

Il ne fait aucun doute que la présence à Paris d’un Centre de conférences internationales moderne, où pourraient être organisés des évènements diplomatiques de dimension mondiale, constituerait un élément fort de l’attractivité de notre capitale. Cette simple réflexion a conduit l’Etat à envisager à deux reprises en vingt ans de lancer la construction d’un tel centre : début 1990, des études approfondies avaient été menées sous l’égide du Secrétariat d’Etat aux grands travaux pour une implantation sur le site où a été construit plus tard le « Musée du quai Branly » ; début 2010, une mission interministérielle, dirigée par M. Noël de Saint Pulgent, avait été chargée d’une étude de faisabilité d’un projet de centre sous l’esplanade des Invalides (cf. annexe 34).

Faut-il pour autant considérer que les besoins de notre diplomatie de conférences suffisent à justifier un tel investissement ? Il est difficile à ce jour de répondre de manière assurée: un recensement des conférences internationales organisées en France par le MAEE de juin 2006 à octobre 2009, réalisé pour la « mission Saint Pulgent », montrait qu’en 40 mois, 25 conférences s’étaient tenues pendant au total 51 jours, soit un taux d’occupation virtuel de 4,25%, et parmi elles, seules deux conférences de très grande ampleur (sommet de l’UPM au Grand Palais et sommet de l’OTAN à Strasbourg). Le pic de l’année 2011, marquée par la conjonction exceptionnelle de notre présidence du G8 et du G20, ne suffit pas à modifier ce constat.

II. 5.2 – Perspectives

* * *

- Proposition n° 7 -

Le gouvernement devrait faire procéder à une évaluation actualisée et chiffrée des objectifs à poursuivre en matière d’accueil de conférences internationales, afin de dimensionner les besoins auxquels devrait répondre la construction éventuelle à Paris d’un nouveau Centre de conférences, en lien avec la Ville de Paris et la Société du Grand Paris.

* * *

a) Construire un Centre de conférences internationales, qui fait défaut à Paris, à même d’accueillir 2000 participants, modulable et conçu pour un usage dual, public et privé.

Des échanges sur ce sujet à la Mairie de Paris et auprès de la Société du Grand Paris, il ressort que plusieurs sites pourraient être envisagés : le secteur dénommé « Aquaboulevard – Sextant – Pullman », à la porte de Versailles, qui va être restructuré en profondeur, dans le prolongement du projet du « Pentagone français ». Il est prévu qu’il offre, du côté Paris, une capacité de 35 000 m2 de plancher répartis entre des immeubles de bureaux, un hôtel et des logements ; la ZAC Nord Est (soit le quartier des secteur Batignolles et du boulevard Macdonald), futur quartier d’affaires qui sera relié en 2016 à l’aéroport de Roissy –Charles de Gaulle par un train direct, inspiré par le « Heathrow Express » londonien ; enfin, les bâtiments et le site de l’Ecole militaire, dont on peut imaginer qu’ils seront moins occupés une fois le « Pentagone français » en service. Des trois sites, le dernier est en première analyse le seul qui, disposant d’une emprise foncière appartenant à l’Etat, pourrait répondre aux conditions de réalisation d’un partenariat public privé (PPP).

L’objet de ce rapport n’est pas de prendre position.

b) Une solution de repli à explorer consisterait à proposer à l’UNESCO de partager les coûts d’une modernisation complète de sa grande salle de conférences et des autres salles attenantes (la grande salle, de 1800 places, n’a fait l’objet que d’une rénovation plutôt cosmétique il y a une dizaine d’années), ceci moyennant un droit pour la France de les utiliser un nombre défini de journées par an. Un partenariat pourrait être recherché aussi avec l’OCDE ouvrant la possibilité de recourir à son centre de conférences (déjà modernisé) à des conditions négociées.

c) Une troisième formule serait de commencer par recenser l’ensemble des équipements susceptibles d’être utilisés aux fins de réunions internationales (avec leurs capacités, leurs coûts de location et d’aménagement, et leurs disponibilités) pour les mettre en regard de nos objectifs en termes d’accueil d’événements internationaux pour les trois années à venir. Une telle approche permettrait de mesurer dans la pratique à quel point des équipements d’accueil supplémentaires devraient être construits, plutôt que de risquer de lancer de nouveaux projets sans avoir suffisamment évalué les besoins à couvrir. Elle mérite donc d’être mise en œuvre sans attendre.

Il importe dans le même temps de lancer la réflexion sur un large éventail d’options à même de renforcer nos équipements et de rehausser la place de Paris dans la course à l’accueil des conférences internationales.

* * *

PRINCIPALES RECOMMANDATIONS DU RAPPORT

- Proposition n° 1 -

Développer une approche d’accueil proactive, mobilisant l’ensemble de services de l’Etat concernés, dont le suivi serait confié à un ambassadeur chargé de l’attractivité de la France pour les organisations internationales.

- Proposition n° 2 - 

Afin de conforter la place de la France aux côtés de l’OCDE comme pays de référence sur les questions de gouvernance financière et fiscale, – Réunir à Paris sous l’égide de l’OCDE, à un rythme annuel, un Forum mondial de la gouvernance financière et fiscale qui permettrait de valoriser les progrès enregistrés à travers les différentes enceintes intergouvernementales spécialisées (GAFI ; Forum fiscal mondial, …) ; en associant aussi les ONG (Transparency International, …) ;

- Assurer le renforcement du Forum fiscal mondial et de son secrétariat permanent au siège de l’OCDE à Paris.

- Proposition n° 3 - 

Consolider la décision d’une implantation parisienne d’INTERPOL dans les locaux du 36 Quai des Orfèvres, en complément du siège lyonnais de l’organisation.

Proposition n° 4 - 

Afin de conforter le rôle de Strasbourg, capitale européenne, dans la promotion des Droits de l’Homme et de la démocratie, mettre en place, sous l’égide du Conseil de l’Europe, un « Forum européen des droits de l’homme », doté d’un secrétariat permanent. Dédié à une approche transversale de l’exercice par les citoyens de leurs droits fondamentaux, le Forum pourra convier les responsables des mécanismes de suivi indépendants concernés à participer à ses travaux. Il associera également les nombreuses ONG intéressées, accréditées auprès du Conseil de l’Europe.

- Proposition n° 5 -

Inviter l’Institut René Cassin et l’Université de Strasbourg à prendre l’initiative d’une « Université Européenne des droits de l’Homme », sous la forme d’un réseau européen d’excellence associant universités et centres de recherche de différents pays, et dont le pôle de coordination serait installé à Strasbourg.

- Proposition n° 6 –

Impulser à partir de la France le volet euro-méditerranéen d’un programme ERASMUS renforcé. Par la densité de ses liens avec la rive Sud de la Méditerranée, par son action de précurseur comme pilote du projet d’Office méditerranéen de la Jeunesse, par la qualité et l’expérience de ses opérateurs (2E2F, Campus France), notre pays a vocation à jouer un rôle central dans la mise en œuvre du programme « ERASMUS pour tous » dans l’espace euro-méditerranéen.

- Proposition n° 7 - 

Faire procéder à une évaluation actualisée et chiffrée des objectifs à poursuivre en matière d’accueil de conférences internationales, afin de dimensionner les besoins auxquels devrait répondre la construction éventuelle à Paris d’un nouveau Centre de conférences, en lien avec la Ville de Paris et la Société du Grand Paris. Il importe dans le même temps de lancer la réflexion sur un large éventail d’options à même de renforcer nos équipements et de rehausser la place de Paris dans la course à l’accueil des conférences internationales.

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ANNEXE

Liste des personnalités auditionnées

Cabinet du Premier ministre

-    M. Arnaud Guillois, Conseiller technique à la cellule diplomatique

-    M. Charles Sarrazin, conseiller technique pour les questions économiques

Ministère des Affaires étrangères et européennes

-       M. Pierre Boussaroque, directeur adjoint de cabinet du Ministre d’Etat

-    M. Jean-Baptiste Mattei, directeur de la Direction générale de la mondialisation, ancien représentant permanent de la France auprès de l’Office des Nations Unies à Genève

-       M. Nicolas de Rivière, Directeur des Nations Unies et des organisations internationales

-    M. Laurent Dominati, ambassadeur, Représentant permanent de la France auprès du Conseil de l’Europe

-    M. Daniel Rondeau, ambassadeur, Représentant permanent de la France auprès de l’UNESCO

Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie

-       M. François Bergère, chef de la Mission d’Appui aux Partenariats Public – Privé (MAPPP)

-       M. Jean-Yves Gacon, chef de projet à la Mission d’Appui aux Partenariats Public – Privé (MAPPP)

Ministère de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration

-    M. Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration

-    M. Philippe Richert, ministre, auprès du ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration, chargé des Collectivités territoriales

-    M. Michel Duclos, conseiller diplomatique du ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des Collectivités territoriales et de l’Immigration

-    M. Christian Lothion, directeur central de la Police Judiciaire (DCPJ)

-    M. Jean-Jacques Colombi, chef de la Division des relations internationales de la DCPJ

-    M. Alexandre Pichon, chef du bureau de coordination nationale de la France à INTERPOL

-    M. Pierre-Etienne Bisch, Préfet de la région Alsace

Collectivités territoriales

-       M. Jean-Claude Gaudin, sénateur,  Maire de Marseille

-       M. Christian Estrosi, député, Maire de Nice

-       M. André Santini, député,  Maire d’Issy les Moulineaux, président de la Société du Grand Paris

-       Mme Nawel Rafik-Elmrini,  adjointe au Maire de Strasbourg

-       M. Bernard Pignerol, conseiller diplomatique du Maire de Paris, délégué aux relations internationales de la Ville de Paris

Agence spatiale européenne (ESA)

-    M. Gaele Winters, directeur du site parisien de l’ESA

Conseil de l’Europe

-       M. Matjaz Gruden, directeur adjoint de cabinet du Secrétaire général

-       Mme Louise Barton, conseiller au cabinet du Secrétaire général

-       M. Frederik Holm, conseiller au cabinet du secrétaire général

-       Mme Ute Dahremoller, directrice générale de l’administration

-       M. Rafael Benitez, directeur des programmes, des finances et des services linguistiques

-       M. Gérard Stoudmann, représentant spécial auprès du secrétaire général pour les questions organisationnelles et la réforme

-       Mme Verena Taylor, directrice du Protocole

-    M. Giovanni Palmieri, Président du Comité du personnel

-    Mme Olivia Conrad, Vice-présidente du Comité du personnel

-       M. Stéphane Leyenberger, Chef de la Division pour l’indépendance et l’efficacité de la justice, Secrétaire de la Commission européenne pour l’efficacité de la Justice (CEPEJ)

-        M. Wolfgang  Rau,   Secrétaire exécutif du Groupe des Etats contre la corruption (GRECO)

-    Mme Suzanne Keitel, directeur de la Direction européenne de la qualité des médicaments et des soins de santé (DQEM)

Cour européenne des Droits de l’Homme

-       M. Patrick Titiun, Chef de cabinet du président de la Cour

-       M. Erik Fribergh, greffier

-       M. Roderick Liddell, directeur des services communs

INTERPOL

-   M. Jean-Michel Louboutin, Directeur exécutif des services de Police

-    M. Laurent Grosse, Directeur de l’administration

-    M. Joël Sollier, Directeur des affaires juridiques

OCDE

-    Mme Gabriela Ramos, directrice de cabinet du Secrétaire générél, Sherpa de l’OCDE pour le G20

-    M. Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d’administration fiscale

-    Mme Josée Fecteau, directreice-adjointe des affaires juridiques

UNESCO

-        M. Eric Falt,  Sous-Directeur général, Secteur des Relations extérieures et de l’information du public (REIP)

-       M. Jacques Rao, Directeur de la Division des Etats membres et des organisations internationales (REIP)

Personnalités qualifiées

-    M. Christophe Rosenau, Président de la Chambre régionale des comptes d’Alsace, chef de la mission d’audit extérieur du Conseil de l’Europe

-    M. Antoine Godbert, directeur de l’Agence « 2E2F »

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Participants à la réunion de travail organisée au Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, le 23 février 2012

Direction de la législation fiscale

Sous-direction des affaires européennes et internationales

-          M. Gaël Perraud, chef du bureau E2

-          M. Tarek Adeida, chef de section

-          Mme Irena Langlois, rédactrice

Direction des résidents à l’étranger et des services généraux

-          M. Jean-Paul Hardoin, directeur

-          M. Cyril Maloine, directeur du pôle de gestion fiscale

Ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l’Etat

Direction générale des douanes et droits indirects

-          M. Henri Havard, sous-directeur des droits indirects

-          M. Jean-François Merle, chef de section transports-franchises

-          Mme Audrey Pilet, rédactrice